Covid-19 et la difficile analyse de la performance économique

Publications Publié le 22 février 2022

Qu’elle soit sportive ou financière, la performance n’existe pas qu’en regard d’une référence. La crise sanitaire a perturbé les repères stables ou durables des investisseurs. Comment, dans ces conditions, analyser la performance des acteurs économiques ?

Les réalisations passées ou les attentes actuelles du monde extérieur constituent bien souvent la référence utilisée pour apprécier la performance. Ainsi parle-t-on de la performance de tel athlète sur une course puisqu’il devance ses rivaux ou réalise un nouveau record comme l’on parle de la performance de tel indicateur boursier qui vole de sommet en sommet. Mais qu’en est-il pour l’entreprise dans un monde où la pandémie de Covid-19 change la donne, vague après vague, où la référence d’hier est déjà dépassée le lendemain ?

Le pilotage de la performance ou le règne du budget et des reforecasts ?

Une première piste de réflexion tient dans le désir de maintenir les pratiques habituelles en préservant une référence. Dans une situation dégradée et emplie d’incertitudes, préserver les pratiques usuelles a quelque chose de rassurant. La comparaison avec des données historiques ne tenant plus du fait de leur volatilité, certains acteurs économiques font le choix de définir la performance de leur organisation en comparant leurs réalisations avec un budget, ou plutôt avec une nième mise à jour de ce dernier. Cette pratique nécessite un investissement significatif dans le processus de remontée de l’information issue du terrain afin de consolider les données opérationnelles et de mettre à jour les tendances observées. L’organisation est alors lancée dans une course contre la montrée budgétaire.

 Le recours à des scénarios probabilisés 

Une seconde option pour analyser la performance de l’entité correspond à la prise en compte par celle-ci de l’incertitude dans son modèle budgétaire. De cette façon, la référence utilisée par la société n’est plus complétement basée sur un environnement ou des hypothèses données mais plutôt définie en tenant compte de plusieurs groupes d’hypothèses probabilisées. Cette pratique avait été mise en avant par les instances professionnelles des métiers du chiffre au moment de la première vague de Covid-19 dans le cadre de la réalisation des tests de dépréciation. Un nombre relativement limité de sociétés du SBF 120 avait retenu cette méthode au 30 juin 2020 et la moitié d’entre elles l’avaient d’ailleurs abandonné dès le 31 décembre 2020. Le bénéfice du ralentissement de la fréquence des mises à jour budgétaires a probablement été jugé limité au regard de la complexe mise en œuvre simultanée de plusieurs jeux d’hypothèses budgétaires complètes ainsi que leur pondération. 

 La recherche d’autres références 

Enfin, une dernière alternative afin d’évaluer la performance de l’organisation en l’absence de référence interne est de se tourner vers l’extérieur, vers ses compétiteurs ou vers des indices sectoriels. Dans un secteur d’activité donné, les effets des vagues successives de Covid-19 se font ressentir de manière relativement similaire pour les différents acteurs. Aussi, l’évolution des réalisations d’une organisation, en comparaison de celles de ses concurrents ou bien du secteur pris dans son ensemble, permet d’en apprécier la performance économique. Dans cette approche, il est important de garder une vision dynamique afin de considérer le niveau de performance d’une organisation au regard de son secteur ou de ses concurrents avant l’avènement de la crise sanitaire puis économique. Suivre l’évolution dans le temps permet ainsi d’identifier les améliorations ou détérioration au sein d’un groupe de pairs que l’on pourrait comparer à un groupe témoin

Dans l’Antiquité, Sénèque disait : « Il n’est pas de vent favorable pour celui qui ne sait pas où il va ». De nos jours, peu nombreux sont ceux qui pourraient bénéficier de tels vents. Incertitudes sanitaires, économiques, financières mais aussi géopolitiques, à bien des égards il est plus compliqué aujourd’hui qu’hier de suivre le niveau de performance économique des organisations. Pour analyser la performance en période de crise de Covid-19, deux lignes directrices peuvent aider le dirigeant. Dans un premier temps, il est utile de prendre du recul par rapport aux remontés de chiffres en gardant à l’esprit qu’au-delà de la performance intrinsèque de l’entreprise l’évolution des conditions économiques sur une période donnée peut expliquer, en partie ou totalement, la bonne ou mauvaise performance. Dans un second temps, le recours à plusieurs outils de pilotage peut agir comme un nuancier donnant ainsi au dirigeant une appréciation plus modérée de la performance de son organisation.

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